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Le baromètre de la scène française - Hiver 2019

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Il y a 6 mois, nous faisions le bilan de la première partie de saison dans l'Hexagone, avec une mention "Encouragements" pour l'ensemble de la scène nationale. En cette fin d'année, le temps est venu de voir si la France a poursuivi la progression engagée au printemps.

Les montagnes russes pour Vitality

C'est peu dire que Vitality était attendue au tournant alors qu'approchait le deuxième Major de l'année, à Berlin. Récents finalistes de l'ESL One Cologne, les Français s'étaient hissés au deuxième rang mondial et faisaient figure d'épouvantail. Seulement, en coulisses, l'atmosphère s'était déjà détériorée depuis plusieurs semaines, malgré des résultats satisfaisants. Et quel meilleur moment pour exploser qu'un Major ? S'ils ont assuré l'essentiel avec le slot Légendes, la composition n'a pas survécu aux luttes de pouvoir entre ALEX et NBK, et c'est ce dernier qui a été écarté.

Nouveau changement et nouveau cycle avec l'arrivée de shox. Dans un premier temps, Vitality profite d'une courte lune de miel pour se hisser en finale de la DreamHack Masters Malmö, un des événements les plus prestigieux de l'année. Malheureusement, le manque de temps pour s'entraîner et l'enchaînement des déplacements cassent la dynamique et, progressivement, les abeilles rentrent dans le rang. Sorties prématurément en ESL Pro League, elles ne parviennent pas à faire mieux qu'un top 8 aux Starseries i-League Season 8 et grattent un top 4 aux IEM Beijing. Un résultat à relativiser puisqu'elles n'y ont battu que TYLOO et FaZe avant de s'incliner face à 100 Thieves.

Il faudra attendre le dernier tournoi de l'année, l'EPICENTER, pour qu'on retrouve les Vita au sommet. Là, ils battent mousesports en finale, alors sur une série de trois lans gagnées, et concluent leur saison sur une note extrêmement positive. ZywOo marche sur l'eau, ALEX réalise le meilleur événement de sa carrière et RpK continue d'éclater des têtes au P250. Seul shox est encore en difficulté, notamment lors de la finale, mais cela n'empêche pas l'équipe de finir l'année avec un nouveau trophée.

Après un Major raté et un automne turbulent, quel plaisir de revoir Vitality comme ça (Photo : HLTV.org)

Malgré une deuxième partie de saison en demi-teinte, Vitality reste la meilleure équipe française. Si elle n'est plus une incontestable du top 3 monde, elle a réussi à s'accrocher au premier wagon et sa victoire à l'EPICENTER annonce de belles choses pour l'année 2020. D'autant que, pour l'instant, shox est encore très largement en dedans. On ne peut qu'imaginer les sommets atteignables par l'équipe si l'ex-G2 retrouve un niveau en accord avec son statut.

Le joueur de la deuxième partie de saison : Mathieu "ZywOo" Herbaut

Qui d'autre ? On était déjà bluffé par ses performances au sein d'une équipe qui tournait, il a montré que même quand les temps sont durs, il continue de surnager. Non seulement il est très largement le meilleur joueur de son équipe, mais il est sans contestation le meilleur joueur français actuel et probablement le meilleur joueur du monde. Autant vous dire que certaines catégories de VaKarM Awards 2019 ne connaîtront pas un grand suspens.

5ème titre de MVP en 2019, cet homme roule sur la scène internationale avec le sourire (Photo : HLTV.org)

 

Les grandes manoeuvres de G2

Après une nouvelle performance décevante lors du Major de Berlin, on se doutait que G2 ne pourrait pas continuer dans la même direction. Néanmoins, si beaucoup s'attendaient à voir Lucky sauter, peu imaginaient que shox pourrait suivre, tant il fut la pierre angulaire de tous les projets francophones de l'équipe depuis 2016. Et pourtant, ce nouvel échec semble avoir eu raison de la patience d'Ocelote, qui a décidé d'aller piocher des talents à l'international, faute de relève intéressante sur la scène locale. Ce sont donc les Serbes nexa et huNter, grandes révélations chez Valiance et CR4ZY, qui ont rejoint kennyS, JaCkz et AmaNEk.

Une surprise pour qui connaissait le niveau d'anglais de certains de nos compatriotes, mais un électrochoc nécessaire pour relancer un projet qui peinait à se stabiliser depuis trop longtemps. Rapidement, l'équipe montre des choses intéressantes sur le serveur, avec un top 6 au StarSeries i-League Saison 8 et une qualification pour les finales de la saison 10 de l'ESL Pro League. Des promesses qui ne se confirment pas, avec deux échecs consécutifs, lors de ces mêmes finales de Pro League et des CS:GO Asia Championships.

C'était sans compter sur une fin d'année qui semble décidément sourire aux équipes françaises. Invitée au cs_summit 5, G2 réalise un joli parcours mais s'incline de façon inexplicable en finale, face à des mousesports qui joueront la majeure partie de la finale avec un stand-in et un coach. Pas déstabilisés pour autant, les G2 remportent enfin leur second titre de l'année une semaine plus tard aux finales de la Champions Cup, quelques minutes à peine avant que Vitality ne gagne l'EPICENTER.

kennyS avec le sourire, le meilleur remède contre la morosité ambiante en France (Photo : Igor Bezborodov)

On pourrait presque copier et coller le commentaire que nous faisions sur G2 il y a 6 mois. Dans d'autres circonstances, cela aurait été inquiétant. Mais là, on a envie de croire que ce projet franco-serbe peut enfin passer un cap. Si on n'imagine pas encore G2 titiller Astralis, on aimerait les voir affronter des concurrents directs pour le bas du top 10 : FaZe, NiP ou encore Na'Vi semblent, en ce moment, tout à fait à la portée des hommes de maLeK. Surtout, avec nexa et huNter, l'équipe a enfin trouvé le leader stable qu'elle cherchait depuis des années et s'est grandement renforcée en puissance de feu.

Le joueur de la deuxième partie de saison : Nemanja "huNter" Kovac

Chez CR4ZY, le cousin de NiKo avait déjà montré qu'il avait le potentiel pour être le Kovac de l'année 2019. Affichant un skill indécent et une régularité dans ses performances, il surnageait dans le tier 2 européen pendant que son illustre cousin s'enlisait chez FaZe. Depuis qu'il est arrivé chez G2, huNter n'a pas ralenti le rythme et est, de loin, le meilleur joueur de l'équipe. Capable d'ouvrir la carte, de prendre n'importe quel match en main et de clutcher, il sera l'atout maître de G2 pour espérer percer dans le top 8 en 2020. Mentionnons aussi kennyS qui, s'il n'est plus aussi dominant qu'avant, reste un élément central de l'équipe, en témoignent ses performances remarquables lors du cs_summit 5.

JaCkz avec nexa et huNter, meilleure union franco-serbe depuis le mariage d'Hélène d'Anjou avec Stefan IV Uros en 1245
(Photo : HLTV.org)

 

Heretics, la déception

Lorsqu'on les avait quittés, les Heretics étaient encore en chantier. jeyN, pourtant très prometteur, avait annoncé vouloir privilégier ses études et l'équipe peinait à retrouver une composition stable depuis le départ de Lucky et JaCkz. Après des résultats honorables lors de l'ECS Pinnacle Cup, elle va profiter du shuffle entre G2 et Vitality pour se renforcer. Dans un premier temps, elle récupère l'expérimenté kioShiMa, un temps annoncé chez Vitality pour remplacer NBK mais doublé par shox. Le lendemain, elle officialise le retour de son ancienne star, Lucky, à la place de JiNKZ. Dix jours plus tard, c'est LOGAN qui fait les frais de ces chamboulements, remplacé par un autre ancien de chez LDLC, devoduvek.

On ne va pas se mentir : sur le papier, la composition davidp/Maka/kioShiMa/Lucky/devoduvek a carrément de la gueule, avec un mélange de joueurs versatiles, talentueux et expérimentés. Et pourtant, force est de reconnaître que la mayonnaise ne prend pas. En ESEA MDL Saison 32, Heretics termine à une piteuse 11ème place, et ses quelques apparitions en ECS Saison 9 se soldent par des défaites rapides. Un temps aux portes du top 30 HLTV, l'équipe échoue désormais à se qualifier pour les ligues en lignes comme l'United Masters League Saison 2.

Le reste de l'année ne se passe pas vraiment mieux. Lors d'une de leurs rares sorties en LAN, les Franco-Belges échouent à sortir des poules des finales de la saison 2 des WePlay! Forge of Masters, défaits par Gambit Youngsters. Peu après, ils s'inclinent en finale de l'OMEN Atlantic Challenge 2019 contre DETONA, dans une lan largement à leur portée. L'engrenage infernal se poursuit avec une élimination lors de la phase de ronde suisse de la LOOT.Bet Saison 5, une compétition où ils avaient pris l'habitude de bien figurer. Enfin, comme pour parachever ce trimestre désastreux, Heretics rate la qualification aux WESG dans un tournoi qui lui tendait les bras, défaite par LDLC et Phoenix. Seule éclaircie, la victoire à La Copa 2019 obtenue avant les changements, avec jeyN, JiNKZ et LOGAN.

C'est peu dire qu'Heretics fut décevante lors de cette deuxième partie saison. Malgré des transferts vraiment ambitieux et un encadrement de plus en plus professionnel, l'équipe n'a pas réussi à atteindre ses objectifs et, pire, semble avoir régressé. De l'extérieur, difficile de dire ce qui l'empêche de prendre son envol ; certains évoquent une atmosphère plutôt morne parmi les joueurs. Une hypothèse pas si surprenante lorsqu'on se rappelle que kioShiMa était en contact avancé avec Vitality et que Lucky jouait des Majors il n'y a même pas 6 mois. Néanmoins, si ceux-ci veulent rebondir et avoir une autre chance au plus haut niveau, ils ne pourront pas se contenter de jouer des qualifications ouvertes de ligues en ligne pour se mettre en valeur.

Le joueur de la deuxième partie de saison : Lucas "Lucky" Chastang

Au milieu de ce brouillard, on ne boude pas notre plaisir de retrouver un Lucky libéré. Confiné à des positions où il n'était pas à l'aise chez G2, il semble avoir retrouvé son mojo dès son retour sous les ordres de davidp. Joueur hybride par excellence, il est revenu à ses fondamentaux : un pro de la rotation, capable d'être le deuxième AWP de l'équipe et d'empiler les frags. Pour l'instant, ce n'est pas suffisant pour hisser Heretics au rang qui lui est dû, mais nul doute que toute réussite du projet reposera nécessairement sur les épaules de l'ancien G2.

Pour l'instant irréprochable, Lucky renait de ses cendres depuis son retour chez Heretics (Photo : Heretics)

 

Annus horribilis pour LDLC

Dans le précédent baromètre, nous défendions l'idée que les maux de LDLC étaient plus profonds que de simples insuffisances liées aux performances de rodeN ou xms. Force est de reconnaitre qu'on ne s'était pas trompés puisque malgré l'exclusion des deux joueurs précités, l'équipe n'a jamais rebondi. Pourtant, à leur place, la structure au renard a fait appel à deux starlettes de la FPL, les Albanais juanflatroo et sinnopsy. Malgré leur apport statistique incontestable, les résultats de l'équipe n'ont pas été fondamentalement transformés.

Après un piteux top 12 lors de la saison 3 de la LOOT.Bet, elle a échoué à se qualifier pour la saison 4. De même, invitée dans un tournoi en ligne pour glaner un accessit à l'OMEN Atlantic Challenge 2019, elle s'est inclinée face aux terribles FATE. Plus récemment, elle a terminé dernière des play-offs de la saison 32 de l'ESEA Advanced, alors qu'un top 5 lui aurait assuré une place en ESEA MDL. Même les ECN, seul sas de décompression en première partie de saison, n'ont pas été plus cléments. Après une saison régulière dominée de la tête et des épaules, LDLC s'incline en grande finale contre TheDice. Sa dernière sortie fut moins catastrophique : en course pour la qualification en ligne des WESG 2019, elle a disposé de TheDice, Heretics et Vexed avant de céder sur la dernière marche contre les Anglais de Phoenix.

A-t-on connu projet plus dysfonctionnel que ce LDLC version 2019 ? Jamais en lice pour accueillir des renforts francophones de poids, l'équipe a enchainé les changements sans véritable ligne directrice et sans succès apparent. Ainsi, même lorsque juanflatroo et sinnopsy ont commencé à faire leur marque et à s'imposer comme les meilleurs joueurs de l'équipe, ils sont rapidement partis vers des terres plus verdoyantes. À leur place, LDLC a récupéré tabz, de loin le meilleur élément de cette fin d'année, et JiNKZ, l'ancien support de chez Heretics. La question qui se pose désormais est celle du leadership du projet. Alors que Happy annonçait, juste avant leur funeste finale contre TheDice, que leur place était plus en MDL qu'en ECN, que penser de la direction esportive de l'équipe ? Jusqu'où sera poussé ce projet mort-né ? Pour tout dire, on ne peut qu'espérer qu'un grand coup de balai soit mis dès le début de l'année afin de repartir sur des bases saines. Reste à savoir avec qui, quels moyens, et pour quels objectifs.

Principaux artisans du projet 2019, nul doute que Happy et Ozstriker voudront attaquer 2020 sur de nouvelles bases
(Photo : HLTV.org)

Le joueur de la deuxième partie de saison : personne

C'est dur, mais c'est comme ça. SIXER est redescendu d'un cran, le lead d'Happy ne convainc toujours pas et MAJ3R s'est trop souvent débattu avec une connexion de 2001. Quant aux autres, ils ne sont pas restés assez longtemps pour en faire des joueurs iconiques. Statistiquement, on retiendra quand même juanflatroo, très prometteur, et tabz, qui surnage véritablement dans le marasme ambiant.

 

Pour le subtop, vivement 2020

Vous allez dire que vu ses résultats, LDLC aurait très bien pu être groupée dans le subtop, surtout quand on compare avec les résultats de la première équipe évoquée ici, TheDice. Cette dernière, qui bénéficie désormais d'un encadrement sérieux avec une gaming house à leur disposition, a montré qu'elle pouvait prétendre au quatrième rang français. Début septembre, le recrutement de DEVIL au lead est venu apporter un supplément d'expérience bienvenu.

Lors de leur première sortie, les Dice ont remporté la Louvard Game 4.3 face à de surprenants DizLown. Une victoire qui fait suite au beau début d'année de l'équipe, qui avait gagné la Gaming Gen 7 et la Gamers Assembly. Mais le paroxysme de leur belle saison arrive en décembre, avec deux titres majeurs. Aux finales des ECN, ils surprennent LDLC, contre qui ils avaient pourtant explosé lors des précédents playoffs à Montpellier. Cette fois-ci, après avoir éliminé HellSide en demi, ils ne tremblent pas et empochent le trophée le plus prestigieux du subtop français. Une belle dynamique confirmée par leur victoire aisée en finale des playoffs de l'ESEA Open, leur permettant d'accéder directement en Advanced pour la saison prochaine.

Contre toute attente, TheDice a pris sa revanche en finale des ECN Winter 2019 contre LDLC (Photo : ESL France)

Mais la vraie nouvelle pour le subtop, c'est l'investissement accru de Louvard Game et la création d'un véritable circuit franco-belge. Au programme, une nouvelle saison de lans estampillées Louvard et la mise en place d'une ligue d'élite, la Number One, avec 20 000 € de cashprize à la clé. Une initiative bienvenue qui devrait aider à la structuration sur le long terme d'une scène trop souvent éclatée. En effet, de ce point de vue, en dehors de TheDice, 2019 a encore montré que le subtop francophone manquait désespérément de stabilité. 

Ainsi, malgré de belles performances et une victoire à la Louvard 4.4, HellSide s'est récemment séparé de drac. Le projet de bodyy n'est apparu qu'une seule fois, lors de cette même Louvard, pour une élimination décevante en quarts de finale. Un projet qui ne décolle toujours pas, probablement ralenti par le départ de devoduvek vers Heretics en octobre. D'ailleurs, la Louvard 4.4 fut un bon révélateur des limites du subtop, avec l'accession en finale d'un mix monté pour l'occasion autour du vétéran jarod.

Temps fort de la saison subtop, la Louvard 4.4 a vu les HellSide de POWELS ravir la coupe sous le nez des favoris.

Hors de nos frontières, ce ne fut pas beaucoup plus convaincant. En plus de LDLC, 3 équipes concourraient en ESEA Advanced. Les Boys in Blue de Lambert, bramz et xReal  finissent avec un piteux 3-13. Les hFM du semi-retraité MAIDHEN et de Misutaaa font à peine mieux avec 4 victoires pour 12 défaites. Enfin, un peu plus haut, à la 52ème place, on retrouve les ex-aAa, avec un bilan de 6 victoires et 10 défaites, peu reluisant mais tout juste suffisant pour se maintenir dans la division, contrairement aux deux équipes précédentes, qui seront reléguées en Main. Bref, ce n'est pas encore cette année qu'une équipe française rejoindra Heretics en ESEA MDL !

 

Alors elle en est où cette scène française ? Et, surtout, où est-ce qu'elle s'en va ? A la première question, on pourrait répondre que la situation n'est pas si éloignée de celle de l'été dernier. Vitality est redescendue de son nuage mais montre des signes très encourageants pour 2020. G2 semble enfin avoir digéré sa réorganisation et pourrait surprendre beaucoup de monde l'année prochaine. Au sein du top inter, on suivra aussi avec attention le nouveau projet de notre NBK national chez OG, après leur première sortie intéressante lors du cs_summit 5.

Chez Heretics, malgré les changements, l'équipe stagne et n'a pas passé le palier qu'on attendait il y a 6 mois. Pour LDLC, c'est une année perdue ; ce qu'on pressentait en juillet s'est confirmé en décembre, l'équipe n'a rien fait et va probablement tout changer dans les semaines à venir. Enfin, le subtop, au-delà de TheDice, est toujours aussi désorganisé et loin de pouvoir prétendre à titiller le subtop européen. Néanmoins, les projets de Louvard Game sont extrêmement excitants et devraient redonner toute sa légitimité à un élément essentiel de l'écosystème de la scène française.

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