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Une chance pour l'Afrique du Sud

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Depuis janvier dernier, cinq joueurs de Counter-Strike et leur coach sont aux États-Unis pour essayer de construire leur rêve. Ils viennent d'un pays qui n'offre aucune chance de participer à un Major et qui n'a jamais accueilli d'événement international sur CS:GO : l'Afrique du Sud. Grâce au projet Destiny, mis en place par leur structure Bravado Gaming, Sonic, ELUSIVE, Detrony, Fadey, JT et leur sixième homme T.C ont six mois pour prouver leur valeur sur la scène américaine. Et peut-être s'offrir un avenir sur Counter-Strike.

L'Afrique du Sud sur CS:GO, ce n'est pas vraiment une référence. Une participation à un Major, la DreamHack Winter 2014, quand Valve invitait encore les équipes de petites nations lors de ses tournois. Bilan du voyage en Suède, trois rounds marqués et deux défaites lourdes mais logiques face à fnatic, 2-16, et Cloud9, 1-16. Plusieurs présences à l'ESWC, en 2014, 2015 et 2016, pour un bilan de dix défaites et une victoire, arrachée par Bravado face aux Indiens d'Overcome lors de l'édition 2016. Et deux voyages en Chine pour les finales WESG, sans jamais réussir à atteindre l'arbre final.

L'Afrique du Sud, c'est aussi Robby "blackpoisoN" Da Loca, peut-être le plus célèbre réprésentant de son pays, parti en Suède en 2015 pour tenter de s'améliorer aux côtés des Européens et qui retournera finalement sur son continent natal quelques mois plus tard.

A l'international, l'Afrique du Sud n'impressionne pas. Pourtant, sa scène est vivante. Bravado, eNergy eSports ou Damage Control font vibrer un pays qui accueille les finales du championnat ESL africain, possède ses qualifications dédiées pour certaines compétitions internationales et joue sa propre ligue ESEA, avec une place reservée aux finales mondiales Global Challenge pour la meilleure équipe qui en sort.

Tous ces avantages d'un point de vue local cachent le plus gros problème de l'Afrique du Sud : son isolement. Trop loin de l'Europe, de l'Amérique, de l'Asie ou de l'Australie, les formations sud-africaines n'ont aucun moyen de se confronter à de meilleures équipes pour progresser. Les quelques rares sorties qu'elles effectuent à travers le monde servent à acquérir de l'expérience mais sont bien trop occasionnelles pour construire quelque chose de solide. Pour progresser, il faut partir. C'est ce qu'ont fait les membres de chez Bravado Gaming en début d'année.

Avec le projet Destiny, ils se sont installés pour au moins six mois aux États-Unis. Pour se confronter à plus fort qu'eux, apprendre et progresser. Pour voir ce que ça fait d'évoluer en permanence au contact d'équipes supérieures, plus expérimentées, plus fortes. Et pour pouvoir, un jour, les battre.

Le projet Destiny, "peut-être la chose la plus excitante qui soit arrivé à l'esport sud-africain"

Les Sud-Africains ne sont pas allés là-bas pour faire du tourisme. Ils ont remporté la 27ème saison d'ESEA Main, pour leur première participation, après avoir terminé en tête de la saison régulière avec 15 victoires et une défaite. Ils seront en Mountain Dew League la saison prochaine, afin d'essayer de décrocher leur place en ESL Pro League. En parallèle, ils ont aussi réussi à atteindre la qualification fermée des ECS et de l'ESL One Belo Horizonte, accrochant au passage plusieurs noms connus de l'autre côté de l'Atlantique et réussissant même à battre Renegades 2-0.

Bravado avait annoncé vouloir raconter son histoire au monde. Ses six représentants, sur un autre continent, sont en train de l'écrire. Et vont tout faire pour qu'elle compte le plus de chapitres possible.

CS:GO est-il très répandu en Afrique du Sud ? Y a-t-il une communauté importante ?

Detrony : CS:GO est plutôt populaire en Afrique du Sud. Il y a une grosse communauté, cependant, la communauté compétitive est assez petite comparée aux joueurs occasionnels qui jouent juste pour le plaisir, répartis dans tout le pays.

Y a-t-il des serveurs ESEA/FACEIT en Afrique du Sud ? Si non, existe-t-il d’autres plateformes, autres que le MM de Valve, pour jouer ?

Detrony : ESEA est l’une des plateformes principales en Afrique du Sud, en dehors de ça, les joueurs restent sur "Billosoft", une plateforme faite pour qu'ils s’affrontent en pug et en scrim, ou utilisent le MatchMaking pour la plupart des joueurs occasionnels.

L’isolement géographique n’est-il pas trop compliqué ? Vous êtes à la fois loin de l’Europe, des Etats-Unis et de l’Océanie, comment réussir à jouer contre des équipes d’autres pays pour s’améliorer ?

Detrony : C’est évidemment un problème majeur pour les joueurs sud-africains. Ce n’est pas très compliqué, la triste vérité est qu’il est impossible de jouer en dehors de notre pays dû au ping engendré par la distance. La seule solution pour un joueur ou une équipe désirant jouer ailleurs est de déménager, comme nous l’avons fait en tant qu’équipe, pour s'entraîner et jouer dans des qualifications et compétitions internationales.

La scène nationale ne souffre-t-elle pas trop de cet isolement ? N’aviez-vous pas l’impression d’être "bloqués" lorsque vous étiez top 1 ?

Detrony : La compétition et la progression sont limitées en effet. Nous nous sommes sentis "bloqués" en tant qu’équipe pendant un bon moment jusqu’à maintenant. Il y avait des qualifications locales pour des tournois internationaux tous les 36 du mois, et quand nous nous qualifiions, il était impossible pour nous de bien performer car nous ne nous entraînions presque jamais contre des meilleures équipes en dehors d’Afrique du Sud, nos résultats étaient donc affligeants dans les tournois à l’étranger. Le projet Destiny, créé par nos sponsors Dell, Alienware et Intel, nous a donné la chance et l’opportunité de vivre ensemble en Amérique du Nord pour s’entraîner contre de meilleures équipes plus régulièrement et évidemment pour partciper à davantage de qualifications et tournois.

Y a-t-il des compétitions internationales africaines ? CS:GO est-il également développé dans les pays de l’Afrique subsaharienne ?

Detrony : Les compétitions internationales ne sont pas si fréquentes que ça mais ont augmenté l’année dernière, il en est de même d’un point de vue local. Par exemple, l’Afrique du Sud a accueilli les finales de l’ESL Afrique en octobre 2017. À part ça, nous avons eu les qualifications WESG Afrique du Sud deux ans d’affilée. CS:GO est sur la pente ascendante en Afrique statistiquement parlant. Le manque d’investissement dans le sponsoring d'équipes et dans l'organisation de tournois pour faire grandir la scène sont les principales difficultés que les acteurs rencontrent actuellement. Pourtant les chiffres sont bons et les opportunités existent.

Vous êtes la seule région à ne pas avoir de Minor, comment faites-vous si vous voulez tenter d'accéder à un Major ?

Detrony : Tu dois bouger. C’est décevant évidemment, mais ça a été notre unique solution. Nous voulons tenter notre chance et nous qualifier à un Minor et peut-être à un Major un jour. Mais actuellement, il n’y a aucune solution en Afrique du Sud, aucune possibilité d’essayer.

Depuis janvier, vous êtes aux États-Unis dans le cadre du projet Destiny. Pouvez-vous nous expliquer en quoi consiste ce projet et nous dire comment il est né, qui a eu l’idée de tenter cette aventure ?

ELUSIVE : Le projet Destiny est notre aventure aux États-Unis, avec l’objectif de s’améliorer et de s’établir en tant que prétendant à un niveau international. La scène sud-africaine est très isolée, avec très peu d’occasions d’affronter des équipes de très haut niveau. L’opportunité de déménager dans un autre pays pour jouer à CS:GO à plein temps est un rêve que nous partagions tous et c’est pourquoi nous, les joueurs et notre structure, Bravado Gaming, avons travaillé ensemble pour réaliser ce rêve.


Les six membres du projet Destiny (cliquez pour agrandir)

Y a-t-il eu des réticences ou un questionnement avant de partir, ou tout le monde a vu ça comme "la chance d’une vie" ?

ELUSIVE : En tant qu’équipe, nous voulions saisir cette opportunité, c’est pourquoi nous n’avions aucun doute au moment de partir.

Pour le moment, on vous voit souvent dans les derniers tours des qualifications ouvertes, ou dans certaines ligues comme l’ESEA Main. Que pensez-vous du niveau de jeu affiché par les équipes américaines ? Est-il plus haut que celui auquel vous aviez l’habitude de jouer ?

ELUSIVE : En Amérique, il y a certaines des meilleures équipes et meilleurs joueurs du monde. Ils disposent également d’un très grand nombre de joueurs ce qui implique davantage de compétition. Certaines équipes que nous avons affrontées ici sont de loin bien meilleures que celles d’Afrique du Sud.

Quelles sont les différences principales que vous pouvez observer entre leur manière de jouer et celle des équipes sud-africaines ?

ELUSIVE : Nous avons remarqué que le style de jeu était plus agressif et avec un rythme plus soutenu. Ils jouent beaucoup les duels et prennent plus de risques. Tandis qu’en Afrique du Sud, le jeu est plus méthodique et calculé.

Après environ trois mois passés là-bas, sentez-vous déjà des progrès dans votre niveau de jeu, des différences dans votre manière de jouer ? Si oui, dans quels domaines ?

ELUSIVE : Nous nous sommes tous améliorés individuellement pour pouvoir rivaliser. Nous avons redéfini les rôles et les positions de chacun depuis notre arrivée sur le continent, mais il y a encore beaucoup à apprendre. Montrer un bon niveau et être régulier est notre but à atteindre.

Quels sont vos objectifs en matière de résultats, à partir de quel moment serez-vous satisfaits ?

ELUSIVE : On aimerait progresser suffisamment pour rencontrer des équipes qui se situent dans le haut du panier. On veut se qualifier pour l’ESL Pro League ainsi que certains autres tournois. On a participé à deux qualifications depuis notre arrivée mais il nous a manqué un petit quelque chose à chaque fois pour se qualifier.

Combien de temps avez-vous prévu de rester, et quel sera votre futur ensuite ? "Simplement" retourner en Afrique du Sud sur votre scène nationale ?

Sonic : On s’est donné six mois pour voir comment ça se passait. Si nous atteignons ou dépassons nos objectifs, nous envisageons de rester six mois supplémentaires. On aimerait quand même revenir jouer sur notre scène locale à un moment donné.

Avez-vous pu nouer des contacts avec certaines équipes ou joueurs américains, qui vous ont conseillé sur le jeu ou tout simplement la vie en Amérique ?

Sonic : Les joueurs locaux ont été vraiment très sympas lorsque nous sommes arrivés. Ils ont respecté notre projet et les sacrifices que nous avons dû faire pour le réaliser.

Est-ce qu’arriver aux États-Unis a considérablement changé votre mode de vie, ou est-il quelque peu similaire à celui d’Afrique du Sud ? Quelles sont les différences principales ?

Sonic : Ca a pas mal changé, bien que la manière de vivre soit à peu près similaire en Afrique du Sud. Le plus grand changement, selon moi, est le fait de vivre dans une culture différente et de s'adapter à la vision générale qu’ont les gens sur la vie.

Vous avez disputé les finales WESG (pour la seconde fois pour certains) en mars dernier après avoir remporté la qualification sud-africaine, pouvez-vous revenir sur ce tournoi et cette expérience ? Comment avez-vous vécu une lan d’une telle envergure ?

Sonic : C’était génial et pour certains d’entre nous un important tremplin ainsi qu’une belle expérience. C’est super de pouvoir jouer contre certaines des meilleures équipes et de les rencontrer en vrai.

L’ESL commence à organiser de gros tournois au Brésil, la DreamHack a un circuit international, même l’Asie et l’Océanie ont aussi leurs compétitions importantes. Pourtant, il n’y a toujours rien en Afrique. Pourquoi n'y a-t-il jamais eu ne serait-ce qu'un projet d'ESL One ou d'une étape DreamHack sur ce continent, notamment dans votre pays ? Quels sont les principaux freins ?

Sonic : Je pense que le problème principal est le retard de développement en Afrique. L’esport semble grandir dans les pays développés technologiquement parlant. Un autre point est le manque d’argent ainsi que de structures pour la formation des jeunes joueurs en devenir.

Merci pour vos réponses ! Le dernier mot est pour vous.

Sonic : J’aimerais remercier les lecteurs qui prendront le temps de lire cet article ! J’ai déjà joué à l’ESWC Paris et j’adorerais revenir ! Je voudrais remercier nos supporters et nos sponsors : Alienware, Intel, Sergio Tacchini et Vertagear.

Merci aux membres de Bravado d'avoir accepté de répondre à nos questions ! Merci également à Miles, Stonz, Kudje et DurandalSword pour la traduction.

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